jeudi 17 février 2011

Pauvre type: IRAK - Colin Powell exige des réponses sur les fausses informations

L'ancien secrétaire d'État américain avait affirmé à l'ONU que Saddam Hussein disposait d'armes de destruction massive.

AFP

L'ancien secrétaire d'État américain Colin Powell a demandé à la CIA et au Pentagone de lui expliquer pourquoi ils lui avaient communiqué des informations erronées sur l'Irak qui leur avaient été fournies par un transfuge surnommé "Curveball", rapporte jeudi The Guardian. Colin Powell avait déclaré, le 5 février 2003, dans un important discours à l'ONU, être au courant de la présence d'armes bactériologiques en Irak, se basant sur des informations fournies par "Curveball".

"La question aurait dû être posée à la CIA et à la DIA (agence de renseignement de défense) avant que cette fausse information (l'existence d'armes bactériologiques) ne figure dans le rapport adressé au Congrès, cité dans le discours sur l'état de l'Union (par George W. Bush), et dans mon intervention à l'ONU du 5 février (2003)", a déclaré au Guardian Colin Powell, réagissant à l'interview du transfuge, parue la veille, dans le même journal.

Le transfuge, alias Rafid Ahmed Alwan al-Janabi, avait déclaré avoir menti quant à la présence de ces armes en Irak. "On savait depuis des années que la source appelée Curveball n'était absolument pas fiable", a ajouté l'ancien secrétaire d'État américain au quotidien britannique. Lors de son discours à l'ONU, Colin Powell avait présenté al-Janabi comme "un ingénieur chimiste". Des renseignements fournis par al-Janabi avaient été utilisés par les États-Unis pour justifier l'invasion de l'Irak en 2003. Les informations communiquées par al-Janabi avaient pourtant été jugées peu fiables par les services secrets allemands, le BND, qui avaient approché le transfuge en 2000.
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La prochaine fois, demande aux français...

mercredi 16 février 2011

Deux Français décrochent un prix à Hollywood

LEMONDE


Arnauld Lamorlette et Eric Tabellion à Los Angeles, le 12 février 2011.REUTERS/JASON REDMOND

Deux Français, Arnauld Lamorlette et Eric Tabellion, ont reçu, samedi 12 février à Los Angeles (Californie) un prix scientifique et technique de l'Académie des arts et sciences du cinéma, "pour avoir inventé un procédé d'éclairage pour images de synthèse adapté aux longs métrages". Comme l'a rappelé l'actrice Marisa Tomei, qui présentait ce dîner de gala à Beverly Hills, "cette étape importante dans l'évolution des techniques d'illumination globale (a été) utilisée pour la première fois sur le film Shrek 2".

Au total, ce sont dix statuettes techniques et scientifiques qui ont été remises ce soir-là à des ingénieurs et à des inventeurs, dans des domaines aussi variés que la motion capture des visages, le pilotage d'engin, la réalisation de cascades de façon sûre, les systèmes de câblage et de suspension pour les caméras 3D ou encore les outils d'effets visuels.

Concepteurs de logiciels pour images de synthèse, Arnauld Lamorlette, 46 ans, et Eric Tabellion, 39 ans, se sont rencontrés en 1998 dans la Silicon Valley, où ils travaillaient pour la société PDI (rachetée depuis par DreamWorks). "L'illumination globale virtuelle simule la façon dont la lumière rebondit sur les objets et interagit avec la géométrie de la scène, afin d'obtenir un éclairage plus naturel, comme dans la vraie vie", expliquent-ils, en précisant : "Nous avons conçu un système suffisamment efficace pour être utilisé sur les longs métrages."

Premier bénéficiaire du procédé d'illumination globale : le dessin animé Shrek 2, réalisé en 2004 par Andrew Adamson, Kelly Asbury et Conrad Vernon pour les studios DreamWorks. Le procédé est vite utilisé dans une dizaine d'autres grandes productions hollywoodiennes, dont Megamind, Dragons etc., qui ont ainsi évité le look assez cru des premières images numériques. "On a fait monter la barre visuellement", commente Arnauld Lamorlette qui, en recevant son prix, a remercié les producteurs de Shrek d'avoir "pris le risque d'utiliser une nouvelle technique sur une telle franchise".

Une quinzaine d'employés

Eric Tabellion travaille toujours dans l'animation pour la même société de la "Valley". Arnauld Lamorlette, formé à l'Ecole supérieure des travaux publics ("faute de formation en images de synthèse accessible à l'époque", dit-il), est cofondateur de la fameuse société franco-américaine d'effets spéciaux Buf, impliqué dans la production de La Cité des enfants perdus, Batman & Robin ou encore Fight Club, et récipiendaire d'un Annie Award (les prix de l'animation) pour les effets spéciaux de Shrek. Il est rentré en France en 2007 et a choisi le Sud (Gémenos, entre Aix et Marseille) pour installer sa nouvelle société numérique, The Bakery ("la boulangerie"), avec une quinzaine d'employés. "Notre avantage est qu'on a une grosse approche technique, tout en connaissant bien les besoins de la production", dit l'inventeur français devenu indispensable à Hollywood.

samedi 12 février 2011

“When you describe reality, you’re treated as a criminal.”

French Provocateur Enters Battle Over Comments

The New York Times

ÉRIC ZEMMOUR


HE is perhaps France’s best-known professional provocateur, as much adored by the xenophobes of the far-right as he is reviled by immigrants, women and gays. But Éric Zemmour might also be misunderstood by his allies and enemies alike, a sort of hopeless intellectual whose nuance is lost in the sensationalist jumble of the media world he inhabits.

A slight man with a quick tongue and a fearsome intellect, Mr. Zemmour, 52, has made a career of speaking on the edge in a culture where the ideal of social harmony often takes precedence over freedom of speech. He can be heard daily on French radio, read weekly in the news media and seen all over television; he is routinely accused of racism, sexism, homophobia, fear-mongering and narcissism, or some combination thereof.

“I’m reviving the ‘French polemic’ in a world that’s on the one hand Americanized, and on the other, that people want to see sterilized by antiracism, by political correctness,” Mr. Zemmour said over coffee at the back of a dark Paris cafe. “That it is to say, where you’re not allowed to say anything bad about minorities.”

In comments that his critics have parsed and denounced and parsed again, he has spoken of a “white race” and a “black race,” decried what he sees as the feminization of society and called homosexuality a social disorder. Last month, though, his pronouncements for the first time brought him before a court, on charges of defamation and “provocation to racial discrimination.”In a televised debate last March he argued that blacks and Arabs were the targets of illegal racial profiling by the French police “because the majority of traffickers are black and Arab; that’s how it is, it’s a fact.” The same day, on another channel, he suggested that French employers “have the right” to deny employment to blacks or Arabs.

The comments surely do not rank among his most incendiary, and, however uncomfortable, the first point might well be true. Even the rights groups that brought the case acknowledge that France’s poor, immigrant populations account for a disproportionate amount of crime, if not a clear “majority,” in a country that does not keep official racial statistics.

MUCH to Mr. Zemmour’s delight, his three-day trial in January drew droves of supporters, including several prominent politicians, along with hordes of critics and a crush of reporters and photographers. His comments had already fueled months of controversy and hand-wringing; he was nearly fired from his post as an editorial writer at Le Figaro Magazine, and Canal+, the television station that broadcast his statement on traffickers, received a warning from the French audiovisual authority.

The intense reaction to Mr. Zemmour’s case — and more broadly, to Mr. Zemmour himself — seems a measure of the tensions in France around race, Islam and integration. And it speaks to the difficulty of discussing those issues in a nation that is committed constitutionally to treat every person simply as a “citizen,” with no acknowledgment of ethnicity, color or religion.

“When you describe reality,” Mr. Zemmour said at his trial, “you’re treated as a criminal.”

His critics say it is less a question of pronouncing realities than how they are pronounced.

“If he had said that there is an ‘overrepresentation of the immigrant population,’ there wouldn’t have been a trial,” said Alain Jakubowicz, a lawyer who heads one of the rights groups that brought suit. “There are the words that are said, and the words that are received, the words that are understood by listeners.”

“He has rights, of course, but he also has responsibilities,” Mr. Jakubowicz added.

From a young age, Mr. Zemmour said, he dreamed of becoming a “journalist-writer-intellectual” in the style of Voltaire, Émile Zola or François Mauriac and other outspoken, sometime-radicals like them. The ambitious son of Jewish Berbers who emigrated from French Algeria in the 1950s, Mr. Zemmour was raised near Paris and attended the elite Institut d’Études Politiques de Paris, known as Sciences Po. Later, after being twice denied admission to the even more rarefied precincts of the École Nationale d’Administration, which feeds the highest echelons of French power, he became a journalist, covering politics, and joined the newspaper Le Figaro in 1996.

Mr. Zemmour is a busy man. Beyond his books and novels, and the ceaseless interviews he gives, he presents a daily editorial on RTL, France’s most popular national radio station; co-hosts a debate program on news channel i>TELE; writes his weekly editorial for Le Figaro Magazine; and appears on a three-and-a-half hour talk show on Saturday nights on France 2, a state-owned television station.

PARADOXICALLY, Mr. Zemmour often exercises his right to free speech to endorse stricter limits on similar freedoms. He advocates a return to authorizing only Christian first names for children born in France, a restriction lifted in 1993; his ancestors in Algeria had adopted French names, he noted. And he hailed the ban on the public wearing of the full facial veil as a way “to oblige people to become authentically French.”

“The state needs to do its job, which it’s always done, of imposing constraints,” he said. “For me, France is the ban on the veil.”

He says that his views are those of a silent majority, French people who seek the return of the resplendent France of de Gaulle, a proud, imagined France unencumbered by the guilt of the post-colonial era. Efforts to integrate the country’s immigrant populations have plainly failed, he said, and the country ought to revert to the “assimilationist” approach he says it abandoned decades ago.

“We believe that we have the best way of life in the world, the best culture, and that one must thus make an effort to acquire this culture,” he said. By contrast, he said, the notion of a country made great by the diversity of its people and values “is an American logic.”

Asked why he believes in the superiority of the French model, he said only that “there is a singular art of living” in France.

“For me, France is civilization with a capital ‘C,’ ” he added.

The groups that have taken him to court have been urging an American social vision, he said. Yet, he added, they are not also willing to endorse American standards of free speech, and they oppose the taking of American-style ethnic statistics.

“I’m taking — because they forced it on me — the American model, and I’m throwing the American model back in their face,” Mr. Zemmour said. “But in the name of French tradition.”

It is a delicate distinction, one even his friends worry might well be lost on most people.

“He’s a very naïve guy,” said Éric Naulleau, a co-participant on the show on France 2, on a broadcast last year. “He has yet to understand the rules of the screen, Zemmour. He thinks he’s in a book where you can explain things, where you can step back.”

Like Mr. Zemmour, Yazid Sabeg, the government’s commissioner for diversity and equal opportunity, has been a prominent voice on France’s integration problems. An Algerian-born businessman, he is also the country’s foremost advocate for the legalization of ethnic statistics. But he denounced Mr. Zemmour’s statements about traffickers as inaccurate and calculated “to spread hate,” and he said he hoped to see him convicted.

“I’m for saying everything,” Mr. Sabeg said. “But not nonsense like this.”

Mr. Zemmour shrugged off Mr. Sabeg’s stance, and that of the plaintiffs in his case, as an absurd logical contortion. “They want the American model without the drawbacks of the American model, and that’s not possible,” he said.

“Maybe I’ll be convicted,” Mr. Zemmour said, with some satisfaction. “But they’ll never untangle themselves from their contradictions.”

mardi 8 février 2011

USA: le Premier ministre canadien parle français, la Fox coupe

Le Premier ministre canadien Stephen Harper fera toujours ses déclarations officielles d'abord en français, a indiqué lundi son porte-parole, interrogé au sujet de l'attitude de certaines télévisions américaines qui ont coupé la transmission de ses propos à la Maison Blanche.

"Que ce soit à Vancouver ou Drummondville, Washington ou Paris, le Premier ministre a toujours commencé ses discours en français. Et il va continuer à le faire tant et aussi longtemps qu'il sera Premier ministre", a indiqué dans un courriel Dimitri Soudas, directeur des communications de Stephen Harper.

Les médias canadiens, qui ont l'habitude du bilinguisme et assurent la traduction simultanée des propos de leurs hommes politiques, ont noté avec indignation que des réseaux américains ont interrompu leur couverture de la conférence de presse de Stephen Harper et de son hôte, vendredi, lorsque le chef du gouvernement d'Ottawa a commencé à parler français, pour la reprendre ensuite quand c'était le tour du président Barack Obama de prendre la parole.

Le présentateur de la Fox a dit que sa chaîne "ne diffuse pas en français", passant aux nouvelles d'Egypte.

Stephen Harper non seulement fait ses déclarations d'abord en français, mais il répond souvent aux questions de journalistes d'abord dans la langue de Molière. Selon son entourage, cela lui permet de choisir soigneusement ses mots. Et, bien entendu, cela produit un effet favorable auprès du public québécois.

Belga

mercredi 2 février 2011

Ce roman français que le général Petraeus a fait rééditer



Le commandant des forces alliées en Afghanistan a trouvé des leçons de stratégie dans «Les Centurions», livre de Jean Lartéguy sur les guerres d'Indochine et d'Algérie.


Un exemplaire du roman de Jean Lartéguy, Les Centurions, épuisé en langue anglaise et traitant des parachutistes en Algérie et en Indochine, peut atteindre les 1.700 dollars (un peu plus de 1.200 euros) sur Amazon.com. Ce simple fait pourrait expliquer sa réédition ce mois de janvier par Amereon LTD, pour un prix conseillé de 59,95 dollars. Mais lorsque j'ai passé un coup de fil à l'éditeur, Jed Clauss, il m'a fait savoir que l'argent n'était pas le motif principal: «Ecoutez, je suis un vieux monsieur», m'a-t-il dit. «Je suis à la fin de ma carrière d'éditeur. Je ne me lance plus que dans des projets qui m'amusent. Mais David Petraeus voulait que ce livre soit réédité. Alors je l'ai réédité.»

Il s’ agit bien du général David Petraeus, l'homme crédité du tournant de la guerre en Irak, aujourd'hui chef des troupes alliées en Afghanistan. J'ai lu la traduction de ce roman de 1960, qui bénéficiait, il y a encore peu, du statut de livre-culte au sein du personnel militaire –et je l'ai aimé. Mais après avoir discuté avec Clauss, je me suis posé cette question: «Pourquoi Les Centurions atteignent-ils des prix pareils et pourquoi ce livre plaît-il au stratège le plus influent de sa génération?».

Mon mari ayant servi sous les ordres de Petraeus en Irak, je suis parvenu à me procurer son adresse e-mail et je lui ai directement posé la question. Il m'a répondu, m'a demandé de féliciter mon mari puis a ajouté, de manière assez énigmatique: «Content de l'apprendre. Bons baisers de Kaboul –Dave Petraeus.» C'était tout. Avait-il délibérément ignoré la question? Ou, plutôt, avait-il lu mon mail en diagonale, et cru que je me contentais de l'informer de la reparution des Centurions? Quelle que soit la réponse, j'ai été ravi du «Dave».

Inspiré par le général Bigeard

Mais «Dave» ne m'avait pas répondu grand chose. J'ai donc tenté de répondre à cette question par moi-même. Et, tandis que je relisais cet épais roman historique, son intérêt m'est apparu de manière assez limpide. Le roman suit les aventures du lieutenant-colonel Pierre Raspéguy, qui doit transformer une unité militaire accoutumée à la guerre conventionnelle en une unité capable de remplir les missions plus complexes et plus délicates de la guerre de contre-insurrection. Les «centurions» auxquels le titre fait référence sont les soldats français de Raspéguy, un terme faisant naturellement référence aux officiers romains de l'Antiquité, qui, sur la fin de l'Empire, combattaient à sa périphérie tandis que l'empire s'effondrait de l'intérieur. Ça vous rappelle quelque chose?

Comme le général Marcel Bigeard, dont son personnage s'inspire clairement, Raspéguy se retrouve un temps dans un camp de prisonniers en Indochine où lui et ses soldats voient «leurs individualités trempées dans un bain de chaux vive» jusqu'à ce qu'il n'en subsiste plus que «le strict essentiel». Durant ce processus de «macération», Raspéguy et ses hommes en profitent pour étudier leur ennemi, le Viet-Minh. Ils prennent conscience que le Viet-Minh ne suit pas les règles conventionnelles de la guerre et motive ses partisans en s’appuyant surtout sur l’idéologie et son dogme. Il s’agit donc d’une force aussi politique que militaire, et vaincre un tel ennemi nécessite une nouvelle pensée, de nouveaux chefs et de nouvelles tactiques. «Pour cette sorte de guerre», songe Raspéguy, «il faut des hommes rusés et astucieux, capables de combattre loin du troupeau et qui font preuve d’esprit d’initiative… qui peuvent effectuer toutes les tâches, braconniers et missionnaires.»

Après un retour difficile en France, Raspéguy et sa compagnie sont envoyés en Algérie. Tandis que le reste de l’armée végète –confinée dans des garnisons, ne se souciant que du règlement et de l’opinion des hauts gradés–, Raspéguy et ses hommes réalisent qu’ils doivent «couper les rebelles de la population, qui leur fournit des informations et les nourrit. Alors seulement, nous pourrons combattre à armes égales».

Les chapitres qui se déroulent en Algérie sont assez similaires aux expériences de Petraeus en Irak. En 2005, alors qu’il devenait de plus en plus évident que les Etats-Unis étaient en train de perdre la guerre, Petraeus se fit l’avocat d’une nouvelle approche, celle de la contre-insurrection (ou COIN), qui diffère de la doctrine militaire traditionnelle en mettant l’accent sur le caractère plus politique que militaire de l’insurrection. En 2006, il supervisa la rédaction du nouveau Field Manual 3-24, la première mise à jour de la doctrine américaine de contre-insurrection depuis vingt ans et le seul manuel de l’armée à avoir fait l’objet d’une critique dans le New York Times. Le FM 3-24 donna à Petraeus le statut de «théoricien militaire», et fit basculer les priorités de la doctrine américaine de l’emploi bref, mais dévastateur, de la puissance de feu, à la patience et à l’adaptabilité, en insistant tout particulièrement sur l'adoption la plus rapide possible des leçons du terrain. Raspéguy aurait été enchanté.


Les similitudes entre Les Centurions et la stratégie actuelle de COIN ne sont pas accidentelles. On sait que Petraeus relit régulièrement des passages du livre et qu’il est également un disciple de Marcel Bigeard. Comme Greg Jaffe et David Cloud le font remarquer dans The Fourth Star (un ouvrage traitant des généraux Petraeus, Peter Chiarelli, George Casey Jr. et John Abizaid), Petraeus a correspondu avec Bigeard durant près de trois décennies et conserve une photo dédicacée du général sur son bureau.

Mais malgré toutes les leçons stratégiques que l’on peut tirer des Centurions, je pense que les militaires apprécient le livre pour des raisons essentiellement émotionnelles. Lartéguy a le don pour mettre en scène des situations psychologiques tendues qui font à la fois la part belle aux idéaux militaires (loyauté, commandement en première ligne, courage) et aux angoisses de la guerre. On lui attribue d’ailleurs l’invention du ressort scénaristique de la «course contre la bombe»: Raspéguy et sa compagnie capturent un chef rebelle qui connaît l’emplacement de quinze bombes qui doivent exploser dans différents magasins européens d’Alger dans exactement 24 heures et ils doivent, naturellement, obtenir cette information avant l’heure dite. De nombreux détails de cette scène, dont une horloge égrénant le temps qui reste, furent utilisés à plusieurs reprises dans la série télévisée 24 heures chrono.

Mais dans 24 heures chrono, la «course contre la bombe» est utilisée pour faire monter la tension dramatique et, diraient certains, pour justifier l’utilisation de «tous les moyens nécessaires» pour faire parler les terroristes. Dans Les Centurions, cette part de l’intrigue est avant tout psychologique et l’officier chargé de l’interrogatoire tente sincèrement d’éviter tout usage de la violence. Il tente de briser la résolution de son prisonnier en lui racontant sa propre expérience de la torture: «Tu ne tiendras pas le coup; et tu sauras alors ce que cela fait d’être un lâche et de devoir vivre avec cette lâcheté le restant de tes jours» (ce qui est, disons-le, bien plus sophistiqué et réaliste que ce que l’on nous raconte dans 24 heures chrono. Le héros de la série, Jack Bauer, aurait enduré deux ans de torture sans prononcer un mot). Si le personnage de Raspéguy finit par utiliser la pression physique, il le fait parce qu’il se laisse totalement submerger par ses propres émotions, une décision qui va causer un véritable traumatisme.

McChrystal, un personnage de Lartéguy

L’acuité du propos de Lartéguy dépasse le champ purement militaire et s’étend également aux relations entre la société et ses guerriers. Les parachutistes haïssent tout particulièrement les généraux ronds-de-cuir qui critiquent leur conduite sans avoir fait l’expérience de leurs souffrances et de leur dilemme moral. Lorsque les centurions apprennent qu’une procédure judiciaire va être intentée contre eux pour «cruauté excessive», Raspéguy déclare: «Maintenant qu’ils ne se chient plus dessus de trouille, ils nous envoient leurs petits carrés de papier.» Dans Les Centurions, le destin du combattant est celui de la fraternité avec ses compagnons d’armes —au détriment de tous les autres. Cette aliénation devient naturellement des plus sévères quand ces hommes rentrent chez eux. Comme Larteguy l’écrit:

«Le paradis dont ils avaient tant rêvé dans les camps de prisonniers se rapprochait lentement et avait déjà perdu de son attrait. Ils rêvaient d’un autre paradis: l’Indochine… ils n’étaient pas des fils accablés rentrant à la maison pour panser leurs plaies. Ils étaient des étrangers.»

Le général Petraeus semble avoir évité une déconvenue aussi extrême. Mais le général Stanley McChrystal, ancien commandant des troupes américaines en Afghanistan, semble sortir du moule de Larteguy. Il est manifeste que McChrystal a lu Les Centurions et qu’il a pu ressentir l’esprit de corps que Lartéguy décrit. Dans une de ses dernières grandes interviews, il a déclaré, dans les colonnes de The Atlantic:

«Au sein du JSOC [commandement intégré des opérations spéciales, ndlr], nous avions ce sens… de la mission, de la passion… appelez ça comme vous voulez. Les insurgés avaient une cause à défendre et nous l’inverse. Nous avions un haut degré de cohésion au sein des unités, comme dans Les Centurions.»

Il est également manifeste qu’il nourrit un profond ressentiment à l’encontre des étrangers à sa condition de militaire. Dans le portrait de Rolling Stone qui ruina sa carrière, il se moquait ouvertement des diplomates et des politiciens qui entendaient se mêler de cette guerre –râlant en recevant un e-mail de Richard Holbrooke (qu’il compare à un animal blessé) et racontant qu’il venait de se faire «baiser» et allait devoir assister à un dîner avec des ministres français.

Lors de sa parution en France en 1960, Les Centurions fut un succès de librairie avec plus de 450.000 exemplaires vendus, et permit à Jean Lartéguy de se tailler un nom dans l’ édition. Les avis sur ses mérites littéraires varièrent. Aux Etats-Unis, lorsqu’il fut publié en anglais peu après, les opinions furent clairement négatives. Le Harvard Crimson le décrivit comme «un très mauvais roman» et le New York Times écrivit qu’il «était impossible de suivre qui était qui et plus encore de s’y intéresser». Mais alors que nous entrons dans la dixième année du conflit en Afghanistan, que nous débattons des mérites de la COIN et que nous voyons s’accroître le fossé entre la société civile et ceux qui font la guerre en son nom, ce livre semble d’une troublante acuité. Les soldats utilisent une phrase toute faite pour décrire ceux qui n’ont jamais combattu en les désignant comme des gens n’ayant jamais «entendu un coup de feu tiré sous le coup de la colère». Il est impossible de comprendre l’impact émotionnel du combat sans l’avoir vécu, mais la lecture des Centurions en est un très bon substitut.

http://www.slate.fr/story/33521/petraeus-larteguy-centurions-roman-guerre

mardi 1 février 2011

For End of the World, a French Peak Holds Allure

The New York Times

A myth surrounds the Bugarach mountain and its supposed magnetism. Some people plan to take refuge there on Dec. 21, 2012.

BUGARACH, France — The rocky mountain of Bugarach, rising just over 4,000 feet in the Corbières Mountains, in one of the poorest and least populated areas of France, has long attracted hikers and nature lovers who like to wander its gentle slopes in search of rare species of orchids.

But in recent years, the mystic beauty and remoteness of the mountain has lured another, less common variety of hiker. Residents call them “the esoterics,” people who believe that the end of the world is coming — don’t forget to mark your calendar — on Dec. 21, 2012.

Last month, the mayor of Bugarach, a tiny village at the foot of the mountain in the southern district of Aude, alerted the local authorities after he read on Internet forums that believers in the apocalypse planned to take refuge here in 2012.

“Some Web sites in the U.S. were selling tickets to come here,” said Jean-Pierre Delord, the mayor. “We are 200 locals; we don’t want 2,000 to 3,000 utopians showing up in Bugarach.”

Some French and international Web sites devoted to the apocalypse claim that the mountain of Bugarach is a sacred place that will protect them from the end of the world. Some even believe that, on doomsday, they will be spirited away by a group of aliens who live under the mountain. The date in question is when a 5,125-year cycle in the Mayan calendar supposedly comes to a close.

A local innkeeper, Sigrid Benard, who offers rooms only in the summer, said she had received numerous calls from people wishing to reserve rooms and mobile homes from the beginning of December 2012 to the end of January.

“People know I’m closed in the winter,” Mrs. Benard said. “But those people said they wanted to come three weeks before the apocalypse and book the week afterward to see what happens.”

Many here, including the mayor, do not want to see Bugarach transformed into a safe haven for those he called “apocalypse believers and lunatics.” They point to an increasing presence of “esoterics,” who settled in Bugarach around the year 2000 and who are also attracted to the tranquillity, the low price of real estate and the history of the area.

“Those people belong to a New Age circle of influence,” Mr. Delord said. “Today, they do business on pure fables; they build inns and organize collective therapies.”

One of the esoterics is a former teacher named Jean. With a wise look and linen pants in winter, he resembles a neo-hippie. He recently settled in a yurt in the forest near Bugarach with hopes of building what he calls “the civilization of the heart.”

“The apocalypse we believe in is the end of a certain world and the beginning of another, a new spiritual world,” Jean said, refusing to give his last name because of the increasing local controversy.

“The year 2012 is the end of a cycle of suffering,” he said. Bugarach is “one of the major chakras of the earth, a place devoted to welcome the energies of tomorrow.”

For other people around France, Bugarach is not just a quaint village with a mountain.

“We all know that aliens are there for thousands of years,” said Paul Ponssot, the owner of a Paris-based bookstore specializing in esoteric literature. “They may be the forces who will help us get through 2012.”

In the little town, even the most pragmatic visitors acknowledged the special atmosphere of the place, silent and vibrant.

Bugarach is like California in the ’60s,” said Didier Gromaire, a social worker from Chambery who spent three months in Bugarach last year. “Things appear more clearly here; when you arrive, you feel that this is the beginning of a new life.”

Bugarach and its surroundings still bear significant traces of medieval religious sects and orders, including the Cathars, who built remarkable castles nearby.

A few miles away sits the village of Rennes-le-Château, whose supposedly hidden treasures have inspired many international authors, including Dan Brown, author of “The Da Vinci Code.”

The peak of Bugarach has long been called “the sacred mountain”; geologists say that soon after the mountain was formed, it exploded and the top landed upside-down. The mountain is also said to have inspired French authors like Jules Verne in “Journey to the Center of the Earth,” and American filmmakers like Steven Spielberg in “Close Encounters of the Third Kind.”

Several reports circulating on the Internet even suggested that former President François Mitterrand visited the peak by helicopter, that there was often a halo of cloud shaped like a spaceship around the summit and that planes never flew over the mountain because of supposed magnetic waves.

“People built an entire myth around the magnetism of the mountain,” said Jean-Luc Lamotte, 60, a retired businessman who owns a house nearby.

Some residents say that they sometimes see parades of people, their arms crossed in an X shape, climbing the peak with figurines of the Virgin Mary in their hands.

Ismo Nykanen, a Finnish journalist who settled in Bugarach with his family a few years ago, said he once spotted several groups of people, some dressed in white, some naked, carrying a ball and a golden ring hung by a thread.

“They stay several months during the summer in campers parked at the bottom of the peak,” Mr. Nykanen said. His teenage daughter, Elsa, said she once saw a truck with a message spray-painted on its door: “Collective suicide: Bugarach 2012.”

Cristina Breiner owns a guesthouse in the nearby village of Rennes-les-Bains. She was recently brought by a friend to a meeting of local esoterics.

“They dress like ordinary people and strongly believe that someone in the sky is sending them messages,” Mrs. Breiner said.

Mayor Delord is trying to figure out how to curb new influxes of utopians in the area, especially with the apocalypse coming. In a country where the government lists at least 30 movements preaching the apocalypse, the mayor’s concerns are not abstract.

“If it happens as in Mr. Spielberg’s ‘Close Encounters of the Third Kind,’ ” Mr. Delord said, “it would be necessary to call in the army.”