mercredi 31 mars 2010

USA: 550 dollars pour une consultation de dix minutes sans la moindre auscultation

Le Monde

Deux jours avant l'adoption de la réforme de la santé aux Etats-Unis, cinq médecins américains se payaient une pleine page de publicité dans le New York Times. "Si votre coiffeur faisait payer la coupe de base en fonction de votre assurance, voici ce que cela donnerait." Suivait une liste de prix très différents selon le type d'assurance santé, des moins chers pour les mieux assurés aux prohibitifs pour les non-assurés.

Que diriez-vous, poursuivaient les médecins, si McDo appliquait aussi ce principe ? Son express "ne figurerait certainement plus à 1 dollar sur son menu !", tant le géant du fast-food devrait payer de bureaucrates pour gérer cet écheveau de coûts différents.

Ces médecins appelaient Barack Obama à faire passer "une loi simplifiée" dont le premier point serait : "Que les prestataires de soins fassent payer à chacun le même tarif pour le même service rendu." Aux assureurs de fixer ensuite leur taux de remboursement.

Cette publicité nous avait touché au coeur. Parce qu'on s'était personnellement heurté au problème. Le docteur B., qui s'occupe d'un de nos genoux récalcitrant, avait plusieurs fois tenté de nous persuader. "Narrez à vos lecteurs ce que vous me racontez, pour qu'ils comprennent qu'en Amérique la santé marche sur la tête."

Evidemment, on ne le faisait pas. Un journaliste n'est pas payé pour raconter ses vaines misères. Mais le docteur B. insistait. Avec la dernière anecdote, il a fini par nous convaincre. Si on peut aider à comprendre dans quel environnement économique, parfois surréaliste, s'est débattue l'administration Obama dans son ambition réformatrice, soit...

L'anecdote, donc : cette semaine, le docteur B. nous demande d'effectuer une imagerie par résonance magnétique (IRM). Serviable, sa secrétaire appelle le service de radiographie de son hôpital. Prudent, au vu de précédentes expériences, nous lui demandons d'en vérifier le coût. La question posée, elle écarquille les yeux, et, chuchotant presque, nous annonce : "2 500 dollars" (1 850 euros). On avait déjà été confronté à cette situation. On lui explique qu'on va se débrouiller autrement.

Trois mois plus tôt, nous avions dû effectuer une première IRM. La préposée du cabinet de radiologie avait posé la question rituelle : "Quel est votre assureur ?" Du contrat passé avec lui dépend le prix de la prestation. On explique, comme d'habitude, disposer de la Sécurité sociale des Français de l'étranger. On montre sa carte. Et, comme chaque fois, on s'entend dire que le cabinet "ne contracte pas" avec cette assurance. On explique alors que l'on payera le service de sa poche, avant de se faire rembourser.

A demi-rassurée, la préposée consulte sa liste des tarifs et vous annonce : "1 650 dollars"... Vous restez coi une seconde. "Mademoiselle, est-ce sérieux ?" On vous regarde comme si vous tombiez de Mars.

"Ça ne va pas, Monsieur ?

- Mademoiselle, à ce tarif-là, j'achète un billet aller-retour pour Paris, j'y fais trois IRM intégralement remboursées et, en plus, j'ai la chance de voir mes enfants !"

Branle-bas de combat. "Asseyez-vous." Manifestement désemparée, la préposée se précipite sur son téléphone. Trois minutes plus tard, elle me rappelle : "460 dollars, ça ira ?"... Payables d'avance, mais ça, on le savait. Vous voilà coi de nouveau. Disons que ça ira, oui. Des amis américains nous l'avaient dit, que la santé, chez eux, c'est "n'importe quoi !" ("nonsense"). On avait eu de multiples occasions de le constater : un spécialiste nous avait déjà pris 550 dollars pour une consultation de dix minutes sans la moindre auscultation ! La santé aux Etats-Unis est le plus souvent un produit soumis aux simples règles de l'offre et de la demande, avec ses acteurs "éthiques" et ses marlous et avec sa grande marge de négociation.

Mais là ? Une même prestation tarifée du simple au quadruple ! On demande une explication. La préposée nous en a donné une. Avouons-le : on n'y a rien compris, tant les termes technico-techniques de l'assurance y abondaient. Voilà pourquoi lorsque, plus tard, l'hôpital nous a demandé non pas quatre mais six fois plus cher, on ne s'est plus étonné. On a simplement dit "non", rappelé le cabinet de radiologie et demandé s'il était possible de bénéficier du même tarif que la fois d'avant. Ce qui nous fut de nouveau accordé. On n'en saura pas plus, les médecins américains de notre connaissance se perdant en conjectures dans leurs exégèses divergentes sur ce cas...

La réforme Obama aura très sensiblement élargi la couverture de la population et mis fin aux abus les plus criants de l'assurance privée : le rejet sans recours des assurés "trop coûteux" étant l'un des pires. Les Etats-Unis sont classés vingt-deuxième sur vingt-six pays riches étudiés dans le dernier bilan santé de l'OCDE.

Selon un récent rapport de la Robert-Wood-Jonhson Foundation, une femme américaine a onze fois plus de risques de mourir pendant sa grossesse ou son accouchement qu'une Irlandaise. Et l'espérance de vie d'un Afro-Américain de La Nouvelle-Orléans est inférieure à celle d'un Hondurien. La réforme Obama devrait permettre aux Etats-Unis de combler progressivement ces retards.

En revanche, et même si la politique tarifaire des assureurs est partiellement contrainte par cette réforme, en laissant globalement intact le coeur du système, que les Etats-Unis sont seuls à pratiquer dans le monde développé, le président "yes we can" ne sera pas parvenu à ébranler ce "n'importe quoi" et ses aspects les plus ubuesques.

mardi 30 mars 2010

Dîner du 30 Mars: Pourquoi la France jouit-elle d’un tel traitement de faveur ?

Le couple Sarkozy sera invité à dîner à la Maison-Blanche le 30 mars. Un honneur rarement accordé, qui laisse perplexe la presse britannique. De quoi vont-ils parler, alors que Nicolas ne peut pas aligner plus de trois mots en anglais ?


Nicolas Sarkozy et Barack Obama accompagnés de leurs épouses respectives à Strasbourg lors de la célébration des 60 ans de l'OTAN, le 3 avril 2009
Après plusieurs cruelles déceptions, le rêve du président français de supplanter la perfide Albion dans le cœur de l’Amérique est en passe de devenir réalité. Le 30 mars, Nicolas et Carla Sarkozy auront l’immense privilège de dîner avec Barack et Michelle Obama dans leurs appartements privés de la Maison-Blanche. L’invitation est assez rare pour être mentionnée. Rappelons que Gordon Brown et Angela Merkel ont eu à se contenter d’une simple conversation dans le Bureau ovale. L’inusable Sarkozy est donc tout excité à l’idée de pouvoir enfin passer le sel au couple le plus célèbre de la planète. Bien avant l’élection d’Obama, il avait fait fonctionner à plein régime ses réseaux diplomatiques pour essayer de s’attirer les faveurs du futur président. Au début, ce ne fut pas une réussite. Les clichés de Sarkozy, juché sur la pointe des pieds pour ne pas paraître trop petit à côté d’Obama, lors d’un sommet de l’OTAN en mars 2009 ont été une première humiliation, mais le coup le plus dur était encore à venir. En juin 2009, le chef d’Etat américain a en effet refusé de dîner à l’Elysée pour emmener Michelle au restaurant.

Après tant d’occasions ratées, le dîner du 30 mars est accueilli à Paris comme un succès diplomatique. Le président américain jouit d’un statut de héros dans les banlieues françaises, et c’est sans doute ce qui plaît tant à Sarkozy. Mais, pour les diplomates français, cette rencontre n’est pas seulement l’occasion pour Sarkozy de remonter dans les sondages. L’Iran, l’Afghanistan et la crise économique sont autant de sujets à aborder. Pourtant, malgré tous les efforts de Carla, Nicolas Sarkozy parle mal anglais. Il a récemment accueilli Hillary Clinton sur le perron de l’Elysée en s’excusant, parlant de la météo, du bad time [“mauvais temps” dans le sens de “mauvais horaire”] au lieu du bad weather. Or, contrairement à leurs époux, les femmes sont très complices. Ainsi, non seulement elles feront la conversation, mais elles risquent aussi d’accaparer toute l’attention. Depuis leur entrée sur la scène politique, les sommets internationaux sont devenus de vrais défilés de mode, leurs tenues étant inlassablement commentées par les médias.

Ce tapis rouge déroulé à Sarkozy risque de faire grincer des dents à Londres – depuis toujours le plus sûr allié des Etats-Unis en Europe. Pourquoi la France jouit-elle d’un tel traitement de faveur ? La volonté d’un rapprochement franco-américain était devenue, selon certains, une obsession pour Sarkozy. Mais les Américains y étaient peu réceptifs, méfiants envers lui. Déçu par la froideur d’Obama, Sarkozy a alors laissé libre cours à sa rancœur, critiquant la faiblesse du président américain lors des pourparlers sur le climat. Dépité, il est allé chercher du réconfort auprès de la Russie. Il a accueilli début mars le président Medvedev à Paris, et accepté de vendre quatre navires de guerre au Kremlin. Ce rapprochement avec Moscou n’a pas pu échapper à Washington. Oui, à y regarder de plus près, les hommes pourraient bien avoir autant de choses à se dire que leurs femmes.

The Sunday Times

jeudi 25 mars 2010

Obama Twitter account 'hacked by Frenchman'




It is not clear if the hacker posted anything on Mr Obama's Twitter page
A Frenchman who police say hacked Twitter accounts belonging to US President Barack Obama and celebrities could face jail.

The unemployed 25-year-old was arrested on Tuesday after an operation lasting several months, conducted by French police with agents from the FBI.

The 25-year-old is said to have hacked into the micro-blogging website, by simply guessing users' passwords.

The suspect reportedly targeted other celebrities, including Britney Spears.

After being questioned by police, he was ordered to appear at court in the central French city of Clermont-Ferrand on 24 June.

Hacking into a database in France is a crime which can carry a two-year jail term.

The suspect, who used the pseudonym "Hacker Croll", had no specialist training, Adeline Champagnat, head of the French central office against online fraud, told Reuters news agency.

He gained access to Twitter accounts by simply working out the answers to password reminder questions on targets' e-mail accounts, according to investigators.

http://news.bbc.co.uk/1/hi/world/europe/8586269.stm

mardi 16 mars 2010

"Rendez-vous with French cinema"

AFP

Le cinéma français s'invite à New York, porte d'entrée du marché américain

Les quinzièmes "Rendez-vous with French cinema" se tiennent à New York, une ville qui a un faible pour le cinéma français et où le succès d'un film peut ouvrir la porte au marché américain.

Les quinzièmes "Rendez-vous with French cinema" se tiennent à New York, une ville qui a un faible pour le cinéma français et où le succès d'un film peut ouvrir la porte au marché américain.

"Les Beaux Gosses", de Riad Satouf, "Le Hérisson" de Mona Achache, "Huit fois debout" de Xabi Molia, "OSS 117-Rio ne répond plus", parodie de film d'espionnage de Michel Hazanavicius: jusqu'au 21 mars, une vingtaine de films sont projetés en avant-première américaine dans des salles de Manhattan et Brooklyn, en présence des réalisateurs qui répondent aux questions des spectateurs, en majorité américains. Et des distributeurs potentiels, dont l'un a déjà acheté les droits de sept films de la sélection.

"J'aime la complexité et le côté imprévisible du cinéma français, qui est considéré comme intellectuel à cause du sous-titrage que seuls les vrais cinéphiles acceptent, mais qui est un cinéma très imaginatif", indique à l'AFP Edward Scheid, critique pour le journal spécialisé "Box Office magazine".

(...)

Avec 24 millions d'entrées par an, le cinéma français représente moins de 2% des parts de marché aux Etats-Unis. Mais il est le premier des cinémas non-anglophones du pays, loin devant les autres, et le marché américain est très important pour les réalisateurs français.

"Plus de vingt films français par an sont distribués aux Etats-Unis", explique à l'AFP Antoine de Clermont-Tonnerre, président d'Unifrance, l'organisme qui assure depuis soixante ans la promotion du cinéma français à l'étranger.

"C'est un marché essentiellement limité aux grandes villes, mais certains distributeurs américains mettent presque immédiatement les films en VOD (vidéo à la demande), ce qui est un nouveau moyen d'atteindre les gens hors des agglomérations", souligne-t-il.

En hausse progressive depuis la fin des années 90, le cinéma français aux Etats-Unis n'a pas subi la crise. Des films ont même connu des résultats notables, comme "Coco avant Chanel" (870.000 entrées), ou "Entre les murs" (540.000 entrées).

L'un d'eux a même eu un succès sans précédent, même si on peut difficilement parler de film français puisqu'il est tourné en anglais et qu'il s'agit d'un film d'action très hollywoodien: "Taken", écrit par Luc Besson et mis en scène par Pierre Morel, a atteint 20 millions d'entrées.

(...)

Au pays des "stars", il est aussi important pour les acteurs de se faire connaître. Aussi plusieurs d'entre eux sont-ils présents à New York pour des soirées-rencontres avec le public, notamment Yvan Attal, Vincent Lindon ou Jean Dujardin, acteur le mieux payé en France en 2009 (4,4 millions d'euros).

lundi 15 mars 2010

En 1951, un village français a-t-il été arrosé de LSD par la CIA ?

Pendant une semaine, il y a près de 60 ans, un bourg entier du Gard, Pont Saint-Esprit, est pris de folie et d'hallucinations. Un journaliste américain prétend avoir percé le mystère : il s'agirait d'une expérience secrète menée par les services américains, en pleine guerre froide.

Vidéos: http://www.ina.fr/sciences-et-techniques/medecine-sante/video/AFE85004211/l-affaire-de-pont-saint-esprit.fr.html

http://www.ina.fr/sciences-et-techniques/medecine-sante/video/CAF97502984/affaire-du-pain-maudit-de-pont-saint-esprit.fr.html


Au moins cinq morts, plus de 30 personnes hospitalisées et près de 300 malades. En août 1951, un fait divers tragique secoue une grosse bourgade paisible des bords du Rhône, Pont-Saint-Esprit.

Ce qui commence comme une banale intoxication alimentaire collective culminera quelques jours plus tard en une nuit de pure folie, des scènes d'hallucinations dignes d'un tableau de Bosch, une « nuit de l'Apocalypse », pour reprendre les termes d'un des médecins locaux, le Dr Gabbaï.

Récemment, France 3 exhumait ce fait divers sous la forme d'une fiction bourrée d'erreurs, « Le Pain du diable », bien que le téléfilm s'inspirât essentiellement du remarquable travail d'un historien américain, Steven Kaplan, « Le Pain maudit » (Fayard), en 2008.

Après des années d'enquête, Kaplan reste frustré : aucune des pistes suivies -ergot de seigle, fongicide, eau, mycotoxines- n'apporte d'explication définitive.

Dans un livre publié aux Etats-Unis fin 2009, le journaliste Hank Albarelli affirme avoir percé incidemment le mystère. La crise de folie qu'a connue Pont-Saint-Esprit viendrait d'une expérience secrète sur les effets du LSD menée conjointement par l'armée américaine et la CIA.

L'affaire du « pain maudit » débute le 17 août 1951. Les salles d'attente des trois médecins de la ville sont pleines. Une vingtaine de malades viennent consulter pour des symptômes apparemment digestifs : nausées, brûlures d'estomac, vomissements, diarrhées.

Viendront s'ajouter dans les jours suivants des fatigues importantes et des insomnies. Pour nombre de malades, après une rémission de 48 heures, les symptômes s'aggravent pour culminer dans des crises hallucinatoires habitées, entre autres, par des flammes et des animaux.

Après une enquête sur place pour le magazine Look, un journaliste américain, John Fuller, décrit dans un article paru en 1968 des scènes d'hallucinations collectives.

Un ouvrier, Gabriel Validire, hurle à ses compagnons de chambrée : « Je suis mort ! Ma tête est en cuivre et j'ai des serpents dans mon estomac ! » Une jeune fille se croit attaquée par des tigres. Un gamin de 11 ans, Charles Granjhon, tente d'étrangler sa mère.

Le 24 août, la situation devient ingérable. Un homme saute du deuxième étage de l'hôpital en hurlant : « Je suis un avion. » Les jambes fracturées, il se relève et court 50 mètres sur le boulevard avant qu'on puisse le rattraper. De nombreux hospitalisés sont saisis d'hallucinations insupportables. D'autres entendent des harmonies célestes.

Très rapidement, des indices pointent le coupable présumé : le pain du meilleur boulanger du bourg, Roch Briand. Dans un article publié par le British Medical Journal moins d'un mois après le début du drame, le Dr Gabbaï écrit :

« La fréquence des symptômes mentaux ramène à l'esprit le vieux nom de la maladie, mal des ardents. »


Autrement dit la maladie de l'ergot de seigle, un champignon parasite des graminées. Courante au Moyen Age, la maladie a disparue en France depuis le XVIIIe siècle.

Mais l'ergotisme peine à expliquer tous les symptômes cliniques constatés. Le Dr Gabbaï et le Pr Giraud de la faculté de médecine de Montpellier, appelés à la rescousse, font vite un parallèle avec les recherches menées en Suisse à la même époque dans le laboratoire Sandoz par Albert Hofmann et qui ont abouti à la découverte par hasard du LSD, synthétisé à partir d'ergot.

Le juge d'instruction chargé de l'affaire évoque la piste criminelle d'une contamination du pain par « une forme de l'ergotine synthétique très nocive ».

Albert Hofmann, qui a fait le déplacement, entérine dans un premier temps la piste de l'ergot ou d'un alcaloïde proche du LSD. Mais une fois rentré à Bâle, le laboratoire rejette l'hypothèse sans appel. De son côté, l'agence américaine United Press rapporte les intrigantes conclusions d'un laboratoire américain à qui elle a transmis des échantillons :

« Les expériences faites (notamment sur des volontaires) en leur faisant absorber du pain ergoté à diverses doses n'ont donné aucun des symptômes constatés chez les malades de Pont-Saint-Esprit. »


Steven Kaplan regrette qu'à l'époque la presse n'ait pas creusé davantage la piste « crépusculaire, voire obscure, du laboratoire américain !


Deux ans plus tard, aux Etats-Unis, un biochimiste de l'armée américaine qui travaille sur des programmes ultra secrets se suicide. Selon la version officielle, il se serait jeté du treizième étage d'un hôtel de New York. C'est en enquêtant sur cette mort suspecte que le journaliste Hank Albarelli a obtenu des documents de la CIA et de la Maison Blanche qui jettent un éclairage sinistre sur les événements de Pont-Saint-Esprit.

A l'issue de la guerre de Corée, les Américains sont persuadés que leurs soldats, prisonniers de guerre, ont subi des lavages de cerveau.

Ils se lancent donc dans une vaste série de programmes défensifs et offensifs sur les questions de la manipulation mentale, des sérums de vérité pour faire parler des prisonniers ou même sur des méthodes pour « incapaciter » l'ennemi et gagner des batailles sans tirer une seule balle.

C'est à ces recherches confidentielles soutenues par la CIA que travaille Frank Olson au sein du SOD (Special Operations Department), à Fort Detrick. Parmi les documents obtenus par Albarelli, le premier retranscrit une conversation entre un agent de la CIA et le représentant américain du laboratoire Sandoz.

Ce dernier insiste pour évoquer le « secret de Pont-Saint-Esprit » et explique à son interlocuteur qu'il ne s'agissait nullement d'ergot mais de diéthylamide (le D de LSD).

Les pratiques « non éthiques » de la CIA

Albarelli entre en contact avec des anciens de l'armée ou de la CIA qui ont côtoyé Frank Olson. Deux d'entre eux, « Albert » et « Neal », lui expliquent, sous couvert d'anonymat, que l'histoire de Pont-Saint-Esprit relève d'une opération conjointe du SOD et de la CIA. Mais lorsqu'il demande si d'autres services secrets, par exemple français, ont participé à l'expérience, il n'obtient qu'un silence.

Des scientifiques de Fort Detrick confient au journaliste américain que les services ont opéré par pulvérisation aérienne d'une mixture à base de LSD ainsi que par la contamination de « produits alimentaires locaux ». L'un d'eux explique que la pulvérisation a été « un échec complet ».

En 1975, une commission d'enquête présidée par Nelson Rockefeller avait commencé à révéler les pratiques « non éthiques » de la CIA, aux appellations multiples : Bluedbird, Artichoke, MK-Ultra, etc. En 2000, Albert et Neal transmettent à Albarelli une fiche d'identité de la Maison Blanche, certainement en rapport avec cette commission, et qui mentionne une « french embassy » et, erreur d'orthographe comprise, « Pont Saint Esprit incident (Olsojn) »

Cette version pose autant de questions qu'elle apporte de réponses. Sans rejeter l'hypothèse, Steven Kaplan s'interroge, par exemple, sur le choix de la ville cobaye : Pont-Saint-Esprit figure dans une région tenue par la gauche. Curieux pour une opération secrète américaine en pleine guerre froide.

« A l'époque, on a évoqué l'hypothèse d'une expérimentation destinée à contrôler une révolte de la population », se souvient Charles Granjhon, 71 ans aujourd'hui, qui habite toujours Pont-Saint-Esprit. « J'ai failli caner. J'aimerais bien savoir pourquoi. » Il n'est pas le seul à vouloir connaître la vérité.

Après la parution de son livre, Albarelli a appris d'un de ses contacts que la DGSE aurait demandé des informations sur l'affaire de Pont-Saint-Esprit au Département d'Etat américain, ce que démentent les services français.

http://www.rue89.com/2010/03/08/en-1951-un-village-francais-a-t-il-ete-arrose-de-lsd-par-la-cia-141947

dimanche 14 mars 2010

Plus d'un adulte sur 100 en prison aux Etats-Unis

La population carcérale a augmenté l'an dernier aux Etats-Unis de 25.000 personnes et s'élevait à quelque 2,3 millions de personnes, sur une population adulte de 230 millions de personnes, soit le taux le plus élevé dans l'histoire américaine, selon le Pew Center.

Plus d'un adulte sur 100 se trouve actuellement derrière les barreaux aux Etats-Unis, pays qui détient la plus importante population carcérale au monde, avec un jeune Noir sur neuf en prison, selon un rapport publié jeudi.

Taux d'incarcération le plus élevé de la planète:

2,3 millions de personnes sont incarcérées aux Etats-Unis. Par comparaison, la Chine, avec une population de plus d'un milliard de personnes arrive en deuxième position avec 1,5 million de prisonniers, suivie de la Russie avec 890.000 personnes détenues, précise le document.

Les Etats-Unis ont le taux d'incarcération le plus élevé de la planète, supérieur à des pays comme l'Iran ou l'Afrique du Sud, relève encore le Pew Center, un centre de recherche indépendant basé à Washington.

L'Allemagne a un taux de 93 détenus pour 100.000 adultes et enfants, il est huit fois supérieur aux Etats-Unis avec 750 pour 100.000.

Les statistiques sont particulièrement frappantes parmi les minorités: alors qu'un adulte blanc sur 106 est incarcéré, c'est un Hispanique sur 36 et un Noir sur 15 qui sont en prison.

Dans la tranche d'âge de 20 à 34 ans, un jeune Noir sur neuf est derrière les barreaux, selon le Pew Center sur la base des données du ministère américain de la Justice.

Alors que les hommes sont dix fois plus susceptibles d'être emprisonnés que les femmes, la population carcérale féminine "progresse d'une manière beaucoup plus rapide" que celle des hommes, selon le rapport de Pew.

Une femme sur 265, entre 35 et 39 ans, se trouve en prison, mais les femmes appartenant à des minorités sont placées en détention en plus grand nombre que chez les femmes blanches.

Une femme noire sur 100 et une Hispanique sur 297 sont en prison, contre une sur 355 femmes blanches, relève l'étude.

Un durcissement de la loi, avec notamment des mesures augmentant nettement la durée d'incarcération pour les récidives, a fait exploser la population carcérale, davantage qu'une augmentation de la criminalité, indique le rapport.

Malgré l'augmentation de la population carcérale, le taux de récidivistes reste relativement stable avec environ la moitié des détenus libérés retournant en prison dans les trois ans suivant leur libération, indique encore le document. (...)

http://www.lexpress.fr/actualite/monde/plus-d-un-adulte-sur-100-en-prison-aux-etats-unis_470639.html

lundi 8 mars 2010

“Change Pétain Street !”

Les historiens sont souvent dérangés pour un oui ou pour un non puisque la mémoire est devenue un enjeu confondu avec l’Histoire. Mais Robert Paxton n’aurait probablement jamais imaginé être sollicité ès-qualités pour régler un différend urbain. Professeur à Columbia University et pionnier de la nouvelle recherche sur l’Occupation depuis la publication de La France de Vichy en 1973, il vient d’être consulté pour donner son avis sur l’avenir de la “Petain Avenue” à Milltown, New Jersey. Cette artère est ainsi baptisée depuis 1920. Mais depuis quelques temps, ça ne passe plus. Depuis que des habitants des environs, qui savent où se trouvent la France et connaissent un peu son histoire, se sont enquis en passant par là de ce que cela n’honorait pas seulement le héros de la première guerre mondiale mais également l’antihéros de la seconde. Petite leçon d’histoire à la clé, l’affaire a pris des proportions à coup de lettres, pétitions et groupes sur Facebook (”Change Pétain Street !”). Ce qui n’est pas du goût des habitants de l’avenue, soutenus par leur conseil municipal, pour qui Pétain fait d’abord partie de leur propre histoire car certains d’entre eux y sont nés. Naître à Pétain…
Le professeur Paxton a donc rappelé que, selon lui, Pétain n’avait pas été un instigateur mais un complice du crime, qu’il était préférable de le rappeler que de le cacher et qu’il ne soutiendrait donc pas “Change Pétain Street !”. L’affaire aura au moins permis d’apprendre qu’il existe une douzaine de rues ou avenues Pétain aux Etats-Unis. Et qu’une plaque portant le nom de Pierre Laval, datant certes de son passage en qualité de président du Conseil en 1931 (année où Time magazine en fit l’”Homme de l’année”), figure dans le fameux Canyon des héros dans le bas de Manhattan…

http://passouline.blog.lemonde.fr/

http://www.nyskies.org/articles/pazmino/parades.htm

vendredi 5 mars 2010

Nouveaux pauvres américains

LE MONDE

(...)

L'Amérique a évité une dépression, et les mesures de soutien à l'économie adoptées par l'administration Obama y ont contribué, écrivent les rapporteurs du Centre du marché du travail, mais "une véritable dépression de l'emploi touche ceux qui se situent au bas de la répartition des revenus, et une profonde récession prévaut dans les catégories situées au milieu de l'échelle". Ce sont ces catégories-là, et non les plus pauvres, auxquelles l'administration entend consacrer le gros de son soutien. C'est parmi elles que l'on retrouve ceux qui font appel à une aide sociale pour la première fois : les tickets d'alimentation, par exemple, dont la distribution croît rapidement ; ou encore l'aide au chauffage, demandée par 5,7 millions de foyers américains il y a deux ans, et par 8,8 millions cet hiver - une hausse de 54 %.

Les nouveaux pauvres sont d'abord ceux qui basculent dans le chômage de longue durée. Statistiquement, la catégorie inclut ceux qui n'ont pas retrouvé d'emploi après six mois de recherche. Diverses mesures adoptées depuis un an ont permis de rallonger cette période de douze semaines supplémentaires.

Quand ils perdent leur travail, la quasi-totalité des salariés perdent également très vite leur assurance-maladie... quand ils en détenaient une (ce qui était le cas de ceux dont l'emploi n'était pas précaire). Leurs indemnités de chômage, elles, se situent d'un Etat à l'autre entre 1 400 et 2 600 dollars maximum par mois, quel qu'ait été leur précédent salaire. Après six à neuf mois, ils en sont donc également privés. Aucune prise en charge de la "longue durée" n'existe.

Début 2007, ils n'étaient que 1,7 million dans ce cas. Ils sont désormais 6,3 millions. C'est déjà le nombre le plus important depuis que le calcul de cette catégorie de chômeurs a été instauré, il y a soixante-deux ans. Et d'ici à avril, 2,7 millions de personnes supplémentaires devraient s'y retrouver plongées si rien n'est fait - essentiellement des salariés âgés ou au contraire très jeunes. Les femmes, les strates les moins éduquées et, plus que toute autre catégorie, les Noirs sont les plus touchés.

Le total atteindrait alors 9 millions. Neuf millions d'ex-salariés dénués de tout revenu, ce sont 20 à 25 millions de "nouveaux pauvres" potentiels en perspective - des gens qui appartenaient aux "classes moyennes" et se retrouvent brutalement plongés sous le seuil de pauvreté, qui se situe actuellement aux Etats-Unis, pour un foyer de 4 membres, à 22 050 dollars (16 280 euros, soit 1 356 euros par mois).

"Perdre toute protection sociale, c'est entrer dans un sous-monde", explique au New York Times Randy Albeda, économiste à l'université du Massachusetts. Le niveau de la protection est déjà intrinsèquement faible aux Etats-Unis. Depuis la fin des années 1970, nombre de programmes nationaux ont été déférés aux Etats ou annulés. Et selon une récente étude du Center for American Progress, de 1979 à aujourd'hui, le revenu des couches les plus pauvres (17 % de la population), ajusté à l'inflation, a régressé de 28,9 %.

Avec la crise budgétaire que connaissent les Etats américains, la plupart procèdent à des coupes claires dans leurs financements sociaux, ajoutant aux difficultés auxquelles se confrontent les nouveaux pauvres. Dans de nombreux Etats, le niveau de revenu permettant de bénéficier de l'aide alimentaire, sanitaire ou scolaire pour les enfants a été drastiquement abaissé, excluant nombre de ceux qui y avaient précédemment droit... et souvent ces nouveaux pauvres qui auraient pu y prétendre.

De l'intérieur de la Californie au nord de l'Ohio, les prêteurs sur gages font florès : les anciens-salariés-nouveaux-pauvres, ayant épuisé leurs économies, se voient refuser tout emprunt par les organismes de crédit. Or quand elles s'adressent au prêteur sur gages, dont les taux frisent souvent l'usure (ou le franchissent allègrement), ces familles sont déjà lourdement endettées à cause de leurs multiples cartes de crédit à la consommation. Ainsi va cette "Amérique de l'ombre" qui enfle à vue d'oeil.