Dans « Une caste américaine, les élections aux Etats-Unis expliquées aux Français » (Les Arènes), John R. MacArthur, directeur du « Harper’s magazine », dépèce méthodiquement le cadavre de la démocratie américaine. L’auteur du livre explique en quoi la démocratie états-unienne est une illusion, soigneusement entretenue par les médias.
Pour ceux qui en douteraient encore, aux États-Unis, illustre patrie des libertés, la souveraineté populaire sombre doucement dans les eaux troubles du néolibéralisme et de la grande consommation. Tel est le message qu’adresse MacArthur au lecteur effaré par la longue revue de détails d’une démocratie en perdition. Tout passe sous le scalpel de l’écrivain-journaliste averti : l’impasse concertée du duel démocrate-républicain, les tricheries électorales, l’argent puissant des lobbyistes, les amours vénales entre politiques et grands industriels, l’hyperconsommation, et la mollesse servile des médias. Un peu plus, et l’on penserait que la Birmanie c’est presque mieux, puisque elle, au moins, ne fait pas semblant.
L’auteur montre, de l’intérieur, comment la démocratie américaine fonctionne, ou plutôt comment elle ne fonctionne pas. Dans le chapitre « Démocratie du consommateur » (p.173) est développé un point très inquiétant. L’auteur analyse la concentration et la docilité du secteur de la presse, laquelle, de mèche avec la publicité, participe au doux sommeil de la population.
Des médias complices d’une sous-démocratie
Comme les enseignes de grands magasins, les groupes médiatiques tendent à se concentrer. Un tiers des propriétaires de presse contrôlent quatre titres sur cinq. Pour MacArthur, « le journalisme américain est donc l’objet d’une uniformisation abrutissante qui porte préjudice à l’exercice de la citoyenneté » (p.184), et l’auteur de rappeler le formidable effort des médias : du New York Times, du Washington Post, ou encore de Fox News T.V, pour relayer les mensonges de la maison Bush sur la menace nucléaire irakienne, en mars 2003. Ou encore l’affaire du programme d’écoutes téléphoniques après les événements du 11 septembre, où Bush, jouant les Big Brother, demanda de façon tout à fait illégale aux trois plus grandes compagnies téléphoniques américaines de fournir à la NSA (National Security Agency) les informations concernant les appels téléphoniques internationaux réalisés par chacun de leurs 200 millions de clients. Établi sans mandat de la Cour Suprême et sans supervision du Congrès, ce programme violait donc le code fédéral et surtout les garanties de libertés civiles de la Constitution. Bizarrerie, pendant plus d’un an, le New York Times refusa de publier les révélations du journaliste James Risen sur ce programme.
Ainsi, selon John R. MacArthur, à chaque nouvelle action politique, la grande majorité des médias américains soutient la Maison blanche avec un entêtement et un aveuglement extraordinaires. Caractère quasi-systématique qui relève, à n’en pas douter, bien plus d’une attitude de renard avisé que d’une nature hybride de mule et mouton. Sur cette attitude, les propos du directeur du Chicago Tribune, James Warren en disent long : « Je ne suis pas le rédacteur en chef d’un journal ; je suis le patron d’une entreprise de contenu » [1]. Tout est dit.
[1] Propos cité dans l’article « Journalistes à tout faire de la presse américaine » de E.Klinenberg daté de l’édition Février 1999 du Monde Diplomatique
http://www.bakchich.info/article4324.html
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