De plus en plus d'Américains décident de renoncer volontairement à leur nationalité. Pas parce qu'ils ne supportent plus Barack Obama ou sont terrifiés à l'idée d'une victoire de Mitt Romney. Non, juste parce qu'ils sont en rébellion contre le fisc, qui les oblige à déclarer de plus en plus d'informations sur l'état de leurs finances offshore et à payer plus d'impôts.
Selon les statistiques publiées le mois dernier par le Federal Register, 1 781 Américains ont abandonné leur nationalité en 2011, une hausse de 16 % par rapport à 2010. C'est une goutte d'eau par rapport aux 5 à 7 millions d'Américains qui vivent à l'étranger, mais c'est sept fois plus qu'en 2008. Et encore, les chiffres sont certainement bien plus élevés car les statistiques du Federal Register ne sont pas très fiables.
Les États-Unis ont un régime fiscal unique. C'est le seul pays industrialisé qui prenne en compte la citoyenneté et non pas le lieu de résidence. Tout citoyen américain, même s'il décide d'aller s'installer sur la planète Mars, doit remplir tous les ans une déclaration de revenus au fisc (IRS) américain et est imposable aux États-Unis au titre de ses revenus mondiaux. Et cela même s'il a déjà payé ses impôts aux autorités martiennes, s'il a toujours vécu sur Mars et n'a jamais travaillé aux États-Unis.
Les expatriés américains bénéficient d'exemptions
Dans les autres pays, un Français qui travaille par exemple en Allemagne est assujetti au régime fiscal allemand. Andrew Mitchel, avocat fiscaliste auteur d'un blog, donne le cas d'école d'un Canadien né au Canada de deux parents américains qui n'a jamais vécu aux États-Unis. Ce dernier doit soumettre une déclaration de revenus au fisc américain toute sa vie à cause de sa double nationalité.
Les expatriés américains bénéficient toutefois d'exemptions. Ils sont autorisés à déduire de leur revenu imposable jusqu'à 92 900 dollars de salaires. Ils ont également la possibilité de retrancher de leur assiette une part des impôts qu'ils ont déjà payés ou demander un crédit d'impôt dans le cadre des traités signés entre les États-Unis et une quarantaine de pays qui évitent la double taxation.
Mais depuis trois ans, les autorités américaines, dans l'espoir sans doute de combler l'énorme trou du déficit public, ont lancé une grande offensive contre l'évasion fiscale en changeant les règles de déclaration et en durcissant les sanctions. L'IRS a ouvert par exemple en 2008 un bureau à Pékin pour traquer les mauvais payeurs américains en Chine. Il a aussi initié une série de mesures destinées à bloquer le financement du terrorisme et à lutter contre la fraude, qui touchent principalement les hauts revenus.
Renier sa nationalité est facile aux États-Unis
Une évolution qui a suscité beaucoup d'émoi chez les ressortissants américains qui se plaignent du coût et de la complexité croissants de leur déclaration de revenus et surtout du fait qu'ils doivent communiquer au fisc de plus en plus d'informations sur l'état de leurs finances. Dans le cadre de la loi Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA), tout expatrié va devoir maintenant donner au fisc une liste de son portefeuille de titres et de ses comptes à l'étranger s'ils dépassent 50 000 dollars, avec à la clé de lourdes amendes s'il ne le fait pas.
En même temps, le gouvernement américain met la pression sur les institutions financières étrangères pour qu'elles lui fournissent des informations annuelles sur les comptes détenus par des Américains. Cinq pays dont la France ont accepté en échange du même type de données sur leurs ressortissants aux États-Unis. Il est encore trop tôt pour savoir si ces nouvelles règles (elles entrent en vigueur progressivement) vont réduire l'évasion fiscale et augmenter les recettes du Trésor américain. Mais d'ores et déjà beaucoup de banques étrangères refusent d'ouvrir des comptes à des Américains sous le prétexte que les demandes de l'Oncle Sam coûtent extrêmement cher et imposent trop de contraintes.
Ce qui fait prédire à Andrew Mitchel une recrudescence du nombre d'Américains reniant leur nationalité. "La prise de conscience croissante des amendes pousse beaucoup de binationaux à conclure que leur nationalité américaine ne vaut pas le stress et les embêtements qu'impliquent les règles du fisc américain", résume-t-il. Or contrairement à la France, renier sa nationalité est assez facile. Il suffit de remplir une demande, verser 450 dollars, s'acquitter, pour les gros revenus, d'une "taxe de départ", et voilà ! Fini le passeport bleu. Il ne reste plus qu'à trouver un pays avec un fisc plus compréhensif.
http://www.lepoint.fr/monde/impots-ces-americains-qui-renoncent-a-leur-nationalite-13-03-2012-1440632_24.php
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