Mais où est donc l'Oscar de Charles Boyer ? Mort sans descendance en 1978 en Arizona, l'acteur qui incarna le « french lover » dans le cinéma hollywoodien a pourtant bien précédé Jean Dujardin à la remise des statuettes dorées. C'est un oscar d'honneur qui lui a été attribué, à la mi-temps d'une carrière d'une exceptionnelle longueur : 80 films en 56 ans, depuis un premier tournage en France en 1920 (« L'homme du large », de Marcel Lherbier) jusqu'à Nina, en 1976 (de Vincente Minnelli). L'Oscar lui a été remis en 1943, un an après qu'il eut pris la nationalité américaine.
Dans sa ville natale, Figeac, occupée par les difficultés de la guerre, les privations et les arrestations, l'honneur fait à Charles Boyer a-t-il été connu ? Il n'a en tout cas pas été applaudi.
« D'une certaine manière, les Figeacois éprouvaient du ressentiment envers lui », explique Philippe Calmon, notaire retraité, historien passionné, et lointain cousin de l'acteur… « Le fait qu'il soit devenu américain n'a pas été apprécié, et lorsqu'il est venu après guerre distribuer de la pénicilline à l'hôpital, cela a été perçu comme un geste ostentatoire. »
Quand survient la guerre, Charles Boyer est une grande vedette, qui tourne aussi bien en France qu'à Hollywood. Son allure et son regard charmeur ont séduit les spectateurs du muet. Au passage du parlant, Boyer est parmi les gagnants : sa voix veloutée passe bien l'écran. Ses partenaires sont de vraies stars : Bette Davis, Greta Garbo, Marlene Dietrich, et de ce côté de l'Atlantique, Danielle Darrieux (seule survivante).
D'Amérique, il participera néanmoins à l'effort de guerre : « Mon salaire pendant la durée des hostilités sera naturellement intégralement versé aux différentes œuvres que l'on m'a signalées… écrit-il au maire de Figeac en décembre 1939… Mettez-moi à contribution autant que vous le voudrez… » On sait que 30 000 francs ont été versés.
Dans le Lot, Louise, la mère de Charles Boyer vit dans une certaine amertume le silence qui entoure la gloire de son fils unique. Elle l'avait soutenu dès le début, ce garçon plutôt réservé qu'elle aurait bien vu « médecin, avocat ou prêtre ». Né en 1899, élève à Figeac, orphelin de père à 12 ans, il fit ses études secondaires à Toulouse avant de monter à Paris où il obtint une licence de philosophie à la Sorbonne. La comédie le démange, et le succès le cueille dès la sortie du conservatoire. Dans les années 20, un film pouvait être produit sur son seul nom. À tel point que la Metro Goldwyn Mayer le repère et lui propose un contrat à 400 $ par semaine. Devant l'énormité de la somme, il accepte. Hollywood l'adopte, il adore l'Amérique.
Marié à l'actrice anglaise Pat Paterson, ils ont un fils. Mais le mélo qu'il a si souvent joué s'invite dans sa vie : son fils se suicide en 1965, sa femme meurt d'un cancer quinze ans plus tard. Il l'accompagne deux jours après, en absorbant une dose mortelle de barbituriques. A Figeac, une plaque a été vissée sur sa maison natale. Le cinéma porte son nom, mais seulement depuis janvier 2000. Le temps d'oublier le malentendu des années de guerre.
Statuettes à vendre
Il est bien dommage que l'Oscar de Charles Boyer ait disparu. Pour la mémoire de sa ville natale, peut-être même pour sa valeur marchande. Car si la revente d'une statuette est interdite par l'Académie des Oscars, 160 trophées auraient été monnayées depuis 1929. Pour ces statuettes de 34 cm, dorées à l'or 24 carats, d'une valeur matérielle de 850 dollars, les offres montent très rapidement. Cette année, quelques jours avant la soirée des Oscars, 15 statuettes ont été vendues par internet pour 3 millions de dollars. A ce jour, l'un des records revient à celle d'Orson Wells pour « Citizen Kane » vendue 861 542 dollars.
http://www.ladepeche.fr/article/2012/03/04/1297623-l-oscar-oublie-du-lotois-charles-boyer.html
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